NEUVIÈME ÉTAGE



Mon cher et tendre, j'arrive ! Je me rapproche, je suis de retour... et je vais te réveiller, j'en ai rien à foutre. Je vais rentrer, prendre une douche fraîche, faire du bruit et le réveiller. Il pourra vomir ses insultes, je m'en fous, je mérite cette douche. Peut-être est-il levé ? Ce serait génial. Improbable, mais génial. Il me regarderait avec des yeux encore plein de sommeil... J’espère qu'il ne me rejoindra pas sous la douche. On ne l'a jamais fait sous la douche, ni ailleurs que dans un lit... Avec les autres c'était différent. Mais les autres ne m'ont jamais dit "Je t'aime ". Lui, si.

Les "autres", il n'y en a pas eu beaucoup. Des petites amourettes sans importance, sans conséquence. Du sexe pour le sexe, ce qui arrange tout le monde. Pas d'investissement ni de compromis, guère de souvenirs.
Jean-Michel est un peu déçu qu'elle ne soit pas vierge, et le lui dit bien sûr. Mais ne fait pas une scène. Il n'aime pas ses jambes, ni son visage quand il est maquillé. Il la trouve belle tout de même. Ses seins tout petits et son cul. Surtout son cul. Il ne se lasse pas de le lui répéter. Il devient fou lorsqu'elle met des jeans moulants, il bande aussitôt. Il lui interdit les vêtements trop longs qui couvrent ce qu'il aime. Ça gêne un peu Marie, cette obsession pour son derrière. Elle a l'impression de n'être plus que cela : une paire de fesses bien balancées. 
Et quand ils font l'amour, c'est très souvent par derrière, en levrette. C'est toujours dans cette position en fait. Sauf la première fois, à l'hôtel.
Lui embrasser ou lui caresser le derrière ne lui suffit plus. Il veut plus encore. C'est absolument hors de question pour Marie. Et Jean-Michel insiste : elle est la seule avec qui il a envie de faire ça, il ne l'a jamais fait... Pour tous les deux, ce serait une première fois. Une preuve d'amour, un don mutuel en quelque sorte.
Marie trouve cela juste dégueulasse, et effrayant aussi. Il essaie de temps à autre, sans lui demander son avis, comme s'il se trompait de chemin par inadvertance. Marie bouge un peu, le remet discrètement à sa place et les choses suivent leur cours habituel, mais elle est lasse de devoir rester attentive, de vérifier sans arrêt vers où se dirige sa queue. Elle ne se laisse pas aller, tout est gâché pour elle. Lui s'en fout, il jouit à tous les coups.
Ce petit manège dure jusqu'à la semaine passée. Marie a presque oublié, elle ne veut pas penser à ça dans les escaliers, ce n'est ni le lieu ni le moment. Ils regardent la télévision et boivent un peu. Lui beaucoup plus que d'habitude, il se crée un prétexte par avance. Ils font l'amour dans la chambre, deux baisers, trois caresses, il la retourne sur le lit. Rien de très original. Il la pénètre, remue plusieurs fois en elle puis sort délibérément sa queue pour la pousser vers son cul. Marie remue, comme elle le fait toujours dans cette situation, mais cette fois est différente. D'une main il lui écrase la tête dans l'oreiller, de l'autre dirige son sexe et force l'entrée. Elle a mal, très mal. Plus encore, elle est humiliée. Son avis ne compte pas, elle n'est qu'une merde. D'ailleurs Jean-Michel en a au bout de la queue quand il se retire enfin ; c'est une preuve concrète, visible de son état minable. Elle n'est rien d'autre qu'un morceau de substance brune et malodorante. Heureusement, il a joui vite, plus vite encore qu'à l'habitude. Il s'essuie les parties souillées de sperme et d'excréments dans les draps puis s'allonge sur le dos.
" Je savais que tu aimerais ça. Toutes mes nanas ont aimé. "
Marie a encore le derrière en l'air et la tête dans la literie. Elle se lève doucement et va se doucher longtemps, très longtemps.
Ils n'ont plus fait l'amour depuis, elle lui dit qu'elle a ses règles. Et lui est trop con pour se rendre compte qu'elle les avait déjà il y a dix jours.
Marie monte ses charges toujours plus haut. Elle ne pense qu'à la douleur de ses bras et de ses mains. Elle ne pense pas. Elle arrive bientôt.

Putain, j'ai des frissons glacés dans le dos. Il va morfler lui aussi. Je suis presque arrivée, ce n'est pas croyable : j'suis devenue une sportive de haut niveau.
   
  

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